1940 dans l’Ouest Aveyron-Zone »libre »

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22 juin 1940 : armistice entre la France et l’Allemagne entre la France représentée par le général Huntziger pour Pétain et le général Keitel pour l’Allemagne d’Adolf Hitler. Ce dernier exige qu’il soit signé dans la clairière de Rethondes dans le wagon de l’Armistice de 1918.

Les premiers malaises vis à vis de la politique de collaboration, de la répression et de la dégradation des conditions de vie apparaissent très rapidement mais sont loin de constituer un basculement vers la résistance. Fin 1939 (décret Sérol) et décembre 1940 (police de Vichy) plus de 50 responsables du PC ou des syndicats de Villefranche de Rouergue, de Capdenac et du bassin houiller sont arrêtés, jugés, emprisonnés ou internés . On comprendra que les communistes « oubliés  », traqués, n’ont guère le choix pas plus que les juifs devant l’alternative « fuir ou faire face ». Pour le reste, une poignées de téméraires entrent en résistance qui doivent se répéter sans cesse « Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre » Ils sont les premiers à faire la sourde oreille à la voix tremblotante de Pétain et reconnaître pour leurs ennemis les nazis de Hitler.

« Fin 1940 envisager la victoire sur l’Allemagne et proposer à quelqu’un d’y contribuer était du domaine de l’aliénation mentale « Henri Frenay(H)

L’idée d’organiser une résistance susceptible de devenir un jour militairement efficace relève de l’irréalisme. Comment imaginer qu’un peuple désarmé puisse réussir là où une armée puissante a échoué ?

Pour les deux années suivantes, 1941 et 1942 pas d’amélioration de la situation , aucune perspective de défaite des allemands ne se dessine même après l’entrée en guerre dans la seconde moitié de 1941 des deux superpuissance, l’URSS et les USA qui dans un premier temps se font allègrement étriller l’une par les allemands, l’autre par le Japon. Jusqu’à l’occupation de la zone Sud il n’y a pas d’Allemand et la presse aveyronnaise entretient sans réserve autour de Pétain le mythe de « l‘homme providentiel »

C’est un petit nombre qui fait les premiers pas de résistance à l’insu de la majorité de la population. Dés les premiers mois de 1940, malgré la répression, les communistes diffusent tracts et journaux à Capdenac et dans le bassin houiller. A l’école normale de Rodez un groupe d’élèves communistes rédigent et distribuent un journal ronéoté intitulé « Quartier Latin » La parcellisation des mouvements rend ardue la connaissance des petits groupes formés au hasard des révoltes individuelles, des rencontres fortuites et des bonnes volontés éparpillées. Lorsque débute vraiment la longue lutte contre l’occupant nazi et le régime pétainiste, pour naître , exister et progresser, il faut innover et inventer les moyens de combat qu’on a choisi de mener. La police de Pétain traque sans preuve et souvent sur dénonciation les suspects de « non-conformisme » On a vu plus haut que des communistes, mais aussi des cheminots de Capdenac, des mineurs du Bassin Houiller et des familles juives ont été arrêtés. Ici ou là apparaissent malgré tout des manifestations hostiles à Vichy : club Gaulliste, premier groupe OS (Organisation spéciale communiste) , V tracés à la craie sur des bâtiments, graffitis favorables à De Gaulle et hostiles au préfet Marion et à Mignonac président de la légion des anciens combattants, des tracts du Front National.

Le 10 juillet sont votés les pleins pouvoirs à Pétain.

Tous les parlementaires aveyronnais (Députés et sénateurs)voteront les pleins pouvoirs à Pétain exceptés Ramadier qui a voté contre et Bastide qui s’est abstenu. Voir l’Aveyron , politiquement en 1939.

Loi du 17 juillet 1940, qui permet de révoquer n’importe quel fonctionnaire et en septembre. Les préfets ont le pouvoir d’arrêter tout individu jugé dangereux pour la défense nationale ou pour la sécurité publique.

Circulaire du 9 août 1940 établie par Pierre Chenevier, directeur de l’Enseignement primaire de Vichy, qui suggère la possibilité d’un déplacement d’office pour les instituteurs « séduits par des théories aujourd’hui périmées [et dont] l’activité antérieure [est jugée] répréhensible

« L’organisation de cette rentrée du 8 septembre a fait l’objet de consignes très précises rédigées par le secrétariat d’Etat à l’Instruction publique de Vichy transmises par les Inspections académiques.Suite à cette journée, les instituteurs ont rédigé des comptes rendus extrêmement précis et nombreux, allant tous dans le même sens, puisqu’ils suivaient scrupuleusement la circulaire du 9 août 1940″ (ADA 338 W 112).

La loi du 8 septembre 1940 ordonne la suppression des Ecoles Normales, leurs adversaires ne leur pardonnent pas d’avoir été les antichambres de la Troisième République avec ses instituteurs imbus de science, de laïcité et de socialisme.

Le 17 septembre, le colonel Marion est nommé préfet de l’Aveyron.(Les préfets de l’Aveyron de 1938 à 1944) et s’attache immédiatement à mettre au pas les fonctionnaires et en premier lieu les enseignants.

Le Préfet répartit les 1400 instituteurs en trois catégories :

  • 400 ont un excellent esprit
  • 850 obéissent et ont compris ce que l’on attend d’eux.
  • 150 ne renoncent en rien à leurs opinions d’autrefois (communistes et sympathisants, socialistes, syndicalistes actifs), ils sont surveillés « la population est leur meilleure surveillant ».

Marion le 17/10/1940 (ADA 2 W 18) : « J’ai dû faire les 11 ou 12 octobre les enquêtes demandées sur les instituteurs ayant adhéré au Parti communiste ou ayant été sympathisants à ce parti ».

ADA 2 W 18 : lettre du Préfet (17/10/1940) au secrétaire d’état à  l’instruction publique signalant le peu d’empressement de l’Inspecteur d’académie de l’Aveyron  (M. Lignières) à déplacer ou sanctionner des maîtres ou à mener des enquêtes sur eux : « Je n’insisterai pas sur des faits passés, qui ont montré M. Lignières nettement favorable aux rouges espagnols » « j’ai l’impression de me trouver en face d’une force d’inertie » « A l’entendre, tous les 1500 instituteurs seraient irréprochables »

Malgré les protestations de Marion, M. Lignières sera cependant nommé Inspecteur d’académie à Montauban)

Son remplaçant lui donnera visiblement toute satisfaction : 14W164-2 : 18 novembre 1941, lettre de Marion au Secrétaire général pour la police sur l’activité du nouvel inspecteur d’académie M. Clemens, Légionnaire. Marion affirme : « Il m’a donné depuis son entrée en fonction les meilleures preuves de son loyalisme, de son autorité, de sa conscience professionnelle. Il est pour moi un sûr collaborateur ».

En Aveyron, 24 sanctions furent prononcées  de septembre 1940 au 15 janvier 1941 (2 révocations, 1 suspension sans traitement, 5 déplacements hors du département, 16 déplacements dans le département) et un total de 61 sanctions de septembre 1940 à novembre 1941, soit une accélération certaineme du préfet Marion (2 révocations, 6 suspensions de traitement, 3 relèvements de fonction, 2 mises à la retraite d’office, 5 déplacements d’office hors du département, 26 déplacements d’office dans le département, 6 déplacements imposés, 2 blâmes du recteur, 9 réprimandes de l’Inspecteur d’académie).

De très nombreux rapports d’Inspecteurs d’académie auprès du Préfet ou d’autres autorités (ou émanant du Préfet) attestent d’une surveillance constante et précise de l’évolution de l’état d’esprit chez les enseignants.

Le 3 novembre condamnation à Villefranche-de-Rouergue , à 5 ans de prison et 500 francs d’amende d’un militant communiste , Henri Boyer(H), droguiste à Capdenac (déjà en prison pour 18 mois). « Le 28 juin il se fit remarquer par une série de manifestations à la fenêtre de sa prison,insulta ses chefs, harangua la foule et lui demanda de prendre d’assaut la prison » Cet acte lui valu une condamnation à cinq ans de prison et à 500 F d’amende.

« La Croix De L’Aveyron 3/11/1940.

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Le 1er décembre arrêté préfectoral contre la propagande communiste et les émissions de tracts : « arrestation immédiate du contrevenant et internement administratif ipso facto » ; « la découverte de tracts extrémistes sur une commune entraînera l’internement administratif des militants communistes notoires connus ».

Le Journal de l’Aveyron, 1/12/1940.

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Le 5 décembre, Marcel Aurières (H)(chaudronnier de 30 ans), Georges Ortol (H)(manoeuvre de 30 ans) et Arthur Lavergne (H) (tourneur de 36 ans) avaient été arrêtés pour les mêmes faits. Ces militants communistes seront jugés, le 31 janvier 1941, par le tribunal de Villefranche-de-Rouergue ; 6 seront condamnés et 1 relaxé. (Marcel Aurière mourra en déportation) Le 16 décembre arrestation à Cransac, pour distribution de tracts de 4 communistes : *Emest Ginestet frère du maire d’Aubin (chaudronnier de 39 ans) , Lucien Higonnenc (mineur de 45 ans), Roger Dumoulin(H) (mineur de 28 ans), et Léon Debons(H). La plupart de ces militants poursuivront leur engagement dans la Résistance et participeront aux combats de la Libération. C’est notamment le cas de Arthur Lavergne (H) . Léon Debons (H), après avoir purgé sa peine à la prison de Rodez fut interné à Digne, dans les Alpes de Haute-Provence. il sera tué lors des combats de la Libération, après s’être évadé et avoir gagné le maquis. Ernest Ginestet sera déporté à Buchenwald, libéré en 1945, il mourra d’épuisement après son retour d’Allemagne. « Le 22 décembre arrestation à Decazeville, par la police spéciale du département de 6 communistes dont : Tournier (H), secrétaire du syndicat des mineurs, Palat (H), délégué des mineurs, Marul, président de la société de secours des mines et un commerçant. Le nombre d’arrestations dans le bassin depuis 6 jours est de 15 « .(Le Journal de l’Aveyron, 27/12/1940)

Albert tournier, Marcel Raynal, Louis Palat, Marcel Régis furent internés dans les camps de Rivel (Aude), Saint-Sulpice-la-Pointe (Tarn), puis déportés en Afrique du Nord aux camps de Djelfa (mai 1941), Bossuet (1943) et Djirieu-Bourescq. Il rentreront en France en octobre 1944.

(Le Journal de l’Aveyron, 22/12/1940)

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